Un point de vue antioppressif

Jeewan Chanicka, EAO, du Toronto District School Board, est d’avis que, malgré tous les progrès réalisés en éducation, certains élèves prennent quand même du retard. Selon certains, le programme d’études ne favorise pas toujours l’inclusion, d’eux-mêmes ou de points de vue plus divers.

Photo: matthew plexman

Enseignant et trois élèves assis à une table dans une salle de classe.

«Nous avons changé notre approche, mais les résultats n’indiquent pas toujours un progrès important, explique M. Chanicka, surintendant à l’équité, à la lutte contre le racisme et l’oppression, au sein de son conseil scolaire. Nous devons reconnaitre que le système ne fonctionne pas bien pour tous les enfants.» Selon lui, il faut promouvoir l’idée que certaines personnes vivent des expériences différentes et on est trop souvent portés à croire que les élèves qui se sentent exclus doivent simplement faire preuve de résilience et de courage. Bien que ces qualités soient admirables, «la responsabilité nous revient en tant que profession».

L’Ordre a favorisé l’élaboration d’une nouvelle ressource portant sur la conception intentionnelle de cours menant à une QA, afin d’appuyer les concepteurs et instructeurs de QA dans la création des cours d’un point de vue antioppressif. Nous avons demandé à des concepteurs et à des instructeurs de la province qui tentaient déjà d’incorporer l’angle de l’antioppression, de consolider ce qu’ils avaient commencé. Leur pratique a jeté les fondements de la nouvelle ressource provinciale, laquelle invite à réfléchir et à entamer un dialogue professionnel afin d’enrichir la pratique par les QA dans les domaines suivants :

Bientôt, cette ressource interactive en ligne comprendra une gamme d’éléments qui visent à stimuler et à articuler la réflexion liée à l’élaboration de cours menant à une QA. Des vidéos, des extraits audios de pédagogues, des ressources recommandées par des enseignants, des ressources de l’Ordre et un certain nombre d’outils encourageront les pédagogues à réfléchir sérieusement à leurs convictions, pratiques, et privilèges sociaux.

«La ressource donne aux concepteurs de cours et aux animateurs la possibilité de réfléchir de façon critique», déclare Susanne Molitor, EAO, enseignante à la retraite du Peel District School Board. Elle agit comme consultante auprès de l’Ordre et a codirigé l’équipe de pédagogues chargée d’élaborer cette ressource.

«Il est important de vraiment réfléchir au résultat escompté, à l’équité et à la façon de faire participer les apprenants à un questionnement dynamique.»

«L’élaboration de cours menant à une QA commence par la conception intentionnelle», explique Mme Molitor, qui a été aussi agente de programme à l’Ordre. Elle soutient que, pour qu’un cours soit élaboré d’un point de vue antioppressif, la conception intentionnelle doit comprendre l’exploration délibérée de nos propres préjugés et valeurs ainsi que de notre compréhension. Il faut savoir juger ce qui est important (quant aux matériaux, à l’orientation du cours, au milieu d’apprentissage et aux évaluations) et donner la priorité à l’équité, à la diversité des perspectives et au questionnement sur le pouvoir et les privilèges dans la conception de cours.

«Cela implique de poser un regard critique sur sa pédagogie, de penser aux voix qui sont représentées dans le cours que vous concevez et à celles qui pourraient manquer. Cela veut dire examiner les dynamiques du pouvoir et des privilèges afin de reconnaitre l’iniquité et la dénoncer», ajoute Mme Molitor.

Quand vous créez une QA ou donnez un cours, «commencez par visualiser la conclusion, dit-elle. Il est impor-tant de vraiment réfléchir au résultat escompté, à l’équité et à la façon de faire participer les apprenants à un questionnement dynamique».

Elle explique comment adopter une approche d’enseignement antioppressive. «Si je suis une enseignante critique, je pense à la dynamique du pouvoir et je cherche à savoir comment mon enseignement facilite une discussion ouverte sur la diversité, explique Mme Molitor. Par exemple, si vous donnez un cours d’anglais, parlez-vous des écri-vains d’autres pays et cultures? Cela tient à votre choix de ressources et au fait que vous parlez de perspectives qui ne confirment pas forcément vos propres expériences.»

La nouvelle ressource aide les concepteurs de cours à découvrir leurs préjugés et à susciter des gestes attentionnés, délibérés et éthiques chez les pédagogues qui suivent le cours.

À l’Ordre, Karen Murray, EAO, a animé des séances éducatives à l’intention des concepteurs et instructeurs de cours menant à une QA sur les façons de prodiguer un enseignement antioppressif. Elle dit que l’oppression a de nombreux visages, certains pouvant sembler inoffensifs.

«Si l’on veut que les élèves soient critiques dans leur façon d’être, on ne peut pas simplement dire : “On a toujours fait ça comme ça”», explique Mme Murray, directrice pour l’équité, l’antiracisme et l’antioppression au Toronto District School Board.

Elle soutient que, même si vous avez les meilleures intentions du monde, vous devez vous arrêter et penser aux raisons qui vous poussent à enseigner d’une certaine façon, ce à quoi vous exposez vos élèves, et aux choix que vous faites. «Les enfants vont vivre dans un monde fragmenté, dit Mme Murray. Si vous dites : “Mes élèves n’ont pas besoin d’apprendre autre chose”, vous leur donnez une façon de voir et de penser. [En tant que pédagogues,] nous sommes censés les préparer à remettre en question le statuquo. Le monde ne ressemble pas [exclusivement] à l’image que l’enseignant s’en fait.»